Une opération de répression coordonnée par l’Organisation mondiale des douanes (OMD) et INTERPOL a abouti à des centaines d’arrestations et vient mettre à mal les réseaux criminels de trafic d’espèces sauvages et de bois.
Baptisée « Thunder 2022 », l’opération, qui a duré un mois (du 3 au 30 octobre) a réuni les forces de police, les douanes, les cellules de renseignement financier et les organismes nationaux chargés de la lutte contre les délits portant sur les espèces sauvages et le patrimoine forestier de 125 pays, soit le plus grand nombre d’interlocuteurs ayant jamais pris part à une opération Thunder depuis le lancement de cette initiative en 2017.
À travers des vérifications de routine ou des inspections ciblées, des centaines de colis, de valises, de véhicules, de bateaux et de transporteurs de fret ont été examinés, en recourant souvent à des chiens détecteurs et des scanners à rayons X.
Des fouilles ont été menées aux points de contrôle terrestres et aériens, ciblant en particulier les spécimens d’espèces protégées par les législations nationales ou par la CITES.
La CITES est un accord international qui vise à garantir que le commerce d’espèces animales et végétales ne menace pas leur survie. Toute forme de commerce enfreignant la Convention est illégale.
Les saisies vont du bois aux animaux vivants, en passant par les parties d'animaux, la viande de brousse et les produits dérivés tels que les vêtements, les produits de beauté, les produits alimentaires, les médicaments traditionnels et l'artisanat.
Une alliance mondiale puissante
Bien que les résultats soient encore en train d’être compilés, l’opération Thunder 2022 a abouti jusqu’à présent à près de 2 200 saisies et à l’identification de 934 suspects, déclenchant une série d’arrestations et d’enquêtes au niveau mondial en lien avec le trafic illicite, l’ouvraison, l’exportation et l’importation de produits de la faune et de la flore sauvages et du patrimoine forestier protégées.
Outre l’identification de 141 entreprises suspectées de participer à des ventes illégales, le nombre total de saisies d’animaux et de plantes protégés à ce jour incluent :
- Pour les espèces sauvages :
- 119 grands fauves et autres félins
- 34 primates, 136 parties de corps de primates
- 25 cornes de rhinocéros
- 9 pangolins, 389 kg d'écailles de pangolin et de produits dérivés
- 750 oiseaux, plus de 450 parties de corps d’oiseaux
- Avec les saisies en unités ou en kg, les résultats comprennent également :
- 1 795 reptiles et près d'une demi-tonne de parties de reptiles et de produits dérivés
- 4 337 et 2 813 kg de produits marins, notamment des coraux, des anguilles et des bêches-de-mer
- 1 190 tortues terrestres et marines, 1 304 unités et 8 kg de parties de leurs corps
- Plus d'une tonne et 17 081 unités d’autres espèces d’animaux ou de flore sauvages, leurs parties ou de produits dérivés
- Pour les espèces végétales et de bois :
- 47,28 m3 de bois de rose et 17 163 pièces
- Près de 47 000 m3 et 6 764 unités d’autres essences de bois
- 710 cactus, 125 et 1 706 kg d’orchidées
- Près de 3,5 tonnes et 7 815 unités d’autres plantes
- Plus de cinq tonnes et 3 945 unités de dérivés de plantes
En Afrique australe, les autorités namibiennes ont intercepté de grandes quantités de bois avant qu’elles ne soient passées en contrebande dans la région, l’Angola a arrêté un ressortissant asiatique qui essayait de se rendre en Asie en transportant des cornes de rhinocéros et des parures en ivoire, et les autorités du Malawi ont saisi des défenses d’éléphant au domicile d'un autre ressortissant d'un pays asiatique.
La Thaïlande a fait rapport de plusieurs saisies de tortues marines en provenance de l’Afrique orientale, confisquant par la même occasion des centaines de reptiles vivants originaires d’Europe, tandis que l’Indonésie a procédé à deux grandes saisies de bois en route vers le Moyen-Orient et l’Asie. L’Inde a saisi quelques 1 200 reptiles, dont des iguanes, des pythons, des varans et des tortues de mer, déclarés comme étant « des poissons d’ornement » et arrivés dans des boîtes en carton.
L’Europe étant devenue une destination de plus en plus fréquente pour les espèces sauvages protégées, la France a également intercepté des reptiles venant d’Afrique centrale cachés dans des bagages, l’Allemagne a retrouvé des amulettes en peau de tigre dans un colis venu d’Asie, et le Royaume-Uni a saisi plusieurs pièces en ivoire après avoir enquêté sur un homme qui vendait des produits tirés d’espèces sauvages sur une plateforme de commerce électronique.
Témoignant de l’engagement du continent américain en faveur de la préservation de son patrimoine naturel, le Costa Rica a arrêté un individu en possession de centaines d’espèces sauvages protégées et le Pérou a publié une notice rouge contre un trafiquant de bois. Des perroquets, des œufs d’iguane, des coraux, des produits en cuir de crocodile, du caviar et de la viande de requin ont été saisis dans plusieurs aéroports internationaux des États-Unis.
Plusieurs pays ont fait rapport de saisies de vêtements et d’accessoires fabriqués en peau de reptile.
« Les opérations transfrontalières à grande échelle comme l'opération Thunder 2022 visent tant à mettre les délinquants derrière les barreaux qu’à sensibiliser l’opinion publique sur les espèces et les produits que les gens peuvent ou ne peuvent pas acheter, vendre ou prélever de la nature – la coopération mondiale entre les différentes parties prenantes est essentielle pour lutter efficacement contre les réseaux criminels transnationaux, depuis les saisies jusqu’aux arrestations et aux poursuites judiciaires ; il en va de même pour la collecte de données, grâce auxquelles les administrations des douanes peuvent affiner leur gestion des risques et leurs stratégies », a déclaré le Secrétaire général de l’OMD Kunio Mikuriya.
« Les opérations Thunder sont importantes pour la sécurité mondiales parce que le trafic de bois et d’espèces sauvages n’est pas uniquement une question de protection de l’environnement – tous les ans, des douaniers y perdent la vie, tous les jours, des personnes perdent leur moyen de subsistance, des maladies se propagent, des gouvernements sont affaiblis et des économies entières sont détruites parce que les énormes profits financiers à tirer de ces trafics attirent les groupes criminels organisés et les militants terroristes, qui alimentent sans cesse la corruption à coup de pots-de-vin », a ajouté le Secrétaire général d’INTERPOL, Jürgen Stock.
Des opérations de terrain fondées sur le renseignement
Les douanes et les unités de la police partagent du renseignement sur le trafic illicite d’espèces sauvages et de bois en amont et durant les opérations , ce qui permet aux agents de détecter et de cibler les zones de trafic les plus sensibles, l’accent étant mis sur les points de passage frontaliers terrestres et les aéroports ainsi que sur les parcs animaliers et les réserves naturelles.
Les criminels bien connus, en particulier les fugitifs faisant l’objet d'une notice rouge, sont identifiés en amont des opérations, et il en va de même pour les entreprises utilisées pour faciliter la criminalité liée aux espèces sauvages et au bois.
Les douanes et la police contribuent aux efforts de protection de l’environnement en rassemblant et en mettant à disposition des éléments de preuve qui permettent d’étayer les enquêtes et les poursuites judiciaires.
Coordonnées par l’OMD et INTERPOL, avec le soutien du Secrétariat de la CITES et du Consortium international de lutte contre la criminalité liée aux espèces sauvages (ICCWC), les opérations Thunder bénéficient d'un financement de la direction générale des partenariats internationaux de la Commission européenne (DG-INTPA), et du ministère de l’Environnement, de l’alimentation et des affaires rurales (DEFRA) du Royaume-Uni.