Le pillage de biens culturels, qui est une des formes les plus anciennes de criminalité transnationale organisée, est aujourd’hui devenu une menace à l’échelon mondial qui figure en tête de la liste des priorités des administrations membres de l’OMD. Par rapport à cette menace, il est largement reconnu que les frontières internationales continuent d’offrir la meilleure opportunité pour intercepter les biens culturels volés, ce qui amène à conclure que les douanes ont un rôle primordial à jouer dans le cadre de la lutte contre le commerce illicite de ce type de biens.
Le trafic de biens culturels a pour conséquence d’entamer le patrimoine culturel d’un pays et de priver constamment la société de la possibilité de profiter de certains trésors culturels parmi les plus importants et les plus précieux. Chaque année, des milliers d’artéfacts disparaissent de musées, d’églises, de collections privées ou d’institutions publiques. D’autres biens sont également constamment l’objet de pillages, ce qui assure l’approvisionnement du marché noir en nouveaux articles provenant de partout dans le monde. Armes anciennes ou tableaux, pièces de monnaie ou montres, objets religieux ou découvertes archéologiques, des dizaines de milliers de biens faisant partie du patrimoine archéologique et culturel mondial sont volés et font l’objet de pillages. Protéger le patrimoine culturel est un devoir, pour la raison essentielle que la culture est indispensable à l’identité de l’être humain et une étape importante du chemin vers la réconciliation et le rétablissement de la paix.
Ces dernières années, il a clairement été démontré qu’il existe un lien entre cette forme de criminalité et l’évasion fiscale ainsi que le blanchiment de fonds. Les estimations données de la taille et de la rentabilité du marché noir des objets d’art pillés, volés ou de contrebande sont certes notoirement peu fiables, mais les spécialistes s’accordent pour dire qu’il s’agit d’une des activités illégales les plus importantes dans le monde et qui suscite donc l’intérêt des groupes du crime organisé et d’autres « entrepreneurs » du crime.
Le recours au commerce de biens culturels par les organisations terroristes à des fins de diversification de leurs sources de financement fait également l’objet d’une attention de plus en plus soutenue de la part des services de lutte contre la fraude. Cette vigilance s’impose d’autant plus que les zones de conflits sont devenues des cibles privilégiées pour les groupes criminels et que certaines de ces régions sont le théâtre de pillages d’une ampleur sans précédent.
Pour assurer la protection du patrimoine culturel, l’OMD préconise une coopération et des partenariats efficaces avec d’autres organisations internationales comme le Conseil international des musées (ICOM), l’UNESCO et INTERPOL, ainsi qu’avec les différents services nationaux de lutte contre la fraude et autres autorités en charge de la sécurité, afin de mettre en œuvre une stratégie adéquate de partage de l’information permettant d’enrayer les activités illégales portant atteinte à la culture. Pour accomplir cette mission, l’OMD compte sur la compétence et les efforts quotidiens dont font preuve ses administrations douanières membres et ses Bureaux régionaux de liaison chargés du renseignement (son Réseau de BRLR).
Un des outils les plus importants élaborés et gérés par l’équipe en charge du Programme est le réseau de communication sécurisée appelé ARCHEO (Réseau ARCHEO) mis en place sur la plateforme CENcomm de l’OMD. Il s’agit d’un outil dédié à la prévention du trafic et du vol de biens culturels, qui permet l’apport d’un appui opérationnel ainsi que l’échange d’informations et d’éléments de renseignement concernant les enquêtes en cours portant sur ce type de biens. Le Réseau ARCHEO est accessible aux douaniers ainsi qu’à des professionnels et experts auprès d’autres services de lutte contre la fraude. Il s’agit également d’un outil dont l’utilisation est recommandée dans la Résolution 2347 (2017) du Conseil de sécurité des Nations Unies ainsi que dans la Résolution 10/7 de la Conférence des Parties à la Convention des Nations Unies contre la criminalité transnationale organisée intitulée « Lutte contre la criminalité transnationale organisée visant les biens culturels ».
La coopération avec les parties prenantes pertinentes est une des recommandations essentielles figurant dans la Résolution du Conseil de coopération douanière concernant le rôle de la douane dans la prévention du trafic illicite des biens culturels, adoptée en juillet 2016. Cette Résolution met en avant un ensemble de mesures concrètes destinées à aider la communauté douanière internationale à lutter contre le commerce illicite de biens culturels. En plus de plaider en faveur d’un renforcement de la coopération avec toutes les parties prenantes pertinentes − comme les experts de terrain et les institutions culturelles − le Conseil de coopération douanière invite les Membres à procéder à une analyse visant à recenser, puis combler, les lacunes existantes dans leurs législations nationales respectives et dans les techniques dont ils disposent en matière de lutte contre ce fléau. Il préconise également une utilisation généralisée, par les autorités douanières, de certificats d’exportation spécifiques aux biens culturels devant être alignés sur le Modèle de certificat d’exportation créé conjointement par l’Organisation des Nations Unies pour l'éducation, la science et la culture (UNESCO) et l’OMD.
Dans sa Résolution de 2016, le Conseil de coopération douanière épinglait notamment le manque de formation disponible dans ce domaine spécifique de la lutte contre la fraude. L’OMD a dès lors commencé à élaborer, en 2017, son nouveau Manuel de formation sur la lutte contre le trafic de biens culturels (le Manuel PITCH, pour « Prevention of Illicit Trafficking of Cultural Heritage » en anglais). Cet outil de formation spécialisée à destination des douaniers de terrain est actuellement disponible en quatre langues, à savoir en anglais, en espagnol, en français et en russe. L’OMD continue de dispenser partout dans le monde son programme et ses activités de formation fondés sur le Manuel PITCH, à l’échelon tant régional que national.
En coopération avec INTERPOL, Europol et différents services nationaux de lutte contre la fraude, l’OMD organise et coordonne également, de manière continue, la conduite d’opérations de terrain régionales et mondiales de lutte contre le trafic de biens culturels. Les Membres de l’OMD contribuent ainsi régulièrement à l’Opération paneuropéenne Pandora et à l’Opération mondiale Athena, qui est organisée tous les deux ans par l’OMD et INTERPOL.
En plus de permettre de fournir des produits analytiques confidentiels aux Membres, le Programme contribue à sensibiliser le grand public à l’égard des tendances et pratiques observées dans le domaine du trafic de biens culturels par le biais de l’élaboration d’un chapitre dédié au patrimoine culturel qui est inclus dans le contenu du Rapport de l’OMD sur les trafics illicites.